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Esprit Prospectif
27 février 2021

Le Carême : Notre occasion au repentir

Sans titre

Première version publiée sur pourunephilosophie

Par Jean-Luc MULYANGA

 1. Chaque année, l’Église met à notre disposition ce temps privilégié qu’est le carême. Une nouvelle occasion au repentir, un temps capital pour marcher spirituellement vers Pâques, vers le fondement de notre foi dans la Résurrection du Christ. Car si le Christ n’est pas ressuscité, alors vaine est notre foi (1Co 15, 14). C’est aussi un temps pour nous tourner davantage vers Dieu[1], pour changer de vie. Pour déchirer nos cœurs et non nos vêtements afin de retourner à Dieu (Jl 2, 13). 

 2. Du latin quadragesima (dies) : quarantième (jour). Le carême signifie donc un temps qui dure 40[2]jours. Les 40 jours de carême symbolisent la vie humaine. Et donc, le carême c’est chaque jour. C’est chaque jour qu’on doit vivre la pénitence, la réconciliation, le jeûne, le partage, la prière et autres attitudes de croissance spirituelle. En outre, rappelons que c’est grâce au Pape Grégoire le Grand que le carême prend son début le Mercredi des Cendres[3]et sa fin le Samedi Saint. Ce qui correspond à une période de 40 jours de jeûne.  

 3. Le carême est un temps de conversion (métanoia) ou de repentir, de réconciliation, de changement, de pardon. Le carême, c’est entrer en soi-même, c’est en toute simplicité reconnaître ses fautes ou son vieil homme, c’est une démarche de franche intériorité. C’est le temps de se repentir à l’image du fils prodigue (Lc 15, 11-32) : « Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils » (v. 21). 

 4. En cela, le carême devient cette marche spirituelle vers Pâques en vue de mourir et de ressusciter avec Christ. Le carême devient cette nouvelle occasion, pour chacun, au repentir. 

 5. Le carême est lié au temps de Pâques. Il est un passage, un périple avec pour destination Pâques. Il prépare donc la fête de Pâques. Alors, comment nous préparons-nous à cette fête qui fonde notre foi ? Ce ne doit pas être par l’apparence extérieure mais par celle intérieure. 

 6. Aux premiers temps de l’Église, le carême mettait au premier plan la privation de consommer la viande et autres aliments interdits. Ainsi, comme période de préparation à la grande fête de Pâques ; au IVème siècle le carême visait deux objectifs :

 - préparer les nouveaux chrétiens à recevoir le baptême, pendant la nuit pascale ;

- permettre aux chrétiens de renouveler leurs promesses de baptême. 

  7. Et aujourd’hui, l’Église nous propose trois domaines d’action afin de vivre le carême : la prière, le jeûne et le partage. 

 - La prière : c’est un dialogue entre l’orant et Dieu. Elle permet de créer un contact régulier avec Dieu et de découvrir sa volonté. La prière est cet entretien avec notre Dieu. La prière est vie. La prière nous aide à redoubler d’efforts afin d’œuvrer convenablement au sein de notre Église, notre groupe, notre profession. Par la prière, nous devenons dignes de l’appel que nous avons reçu (Ep 4, 1). La meilleure école de prière n’existe qu’au fond de son propre cœur. Pour apprendre à prier, il faut commencer à prier. Et dans la prière, il faut aller au-delà de la multitude des mots. 

 - Le jeûne : le jeûne qui plaît à Dieu, c’est celui qui fait tomber les chaînes injustes; c’est partager de son pain avec celui qui a faim ; c’est accueillir chez soi les sans-abris ; c’est couvrir celui qui est sans vêtements ; c’est venir au secours des miséreux (Is 58, 7) ; c’est la voie du renoncement ; c’est accepter de vivre le manque. Le jeûne est une privation de moments forts de notre vie pour l’essentiel de la vie (être en contact avec Dieu). Le jeûne met un frein au péché. C’est aussi se retenir de paroles malfaisantes ou se priver d’un regard malsain (regard de jugement). Le jeûne, c'est un chemin de la pauvreté et du manque. 

 - Le partage : ici, c’est toute la générosité de Dieu que nous devons imiter. Nous serons jugés sur base de l’amour pour nos frères (Mt 25, 31-46). Savoir partager de son temps, de son sourire, de sa présence, de ses talents, de la consolation, de la compréhension, de son pardon. C’est vivre avec les autres autrement qu’en conflit et en tension. Grâce à l’aumône, nos péchés pèsent moins lourds.  

 

Occasion au repentir : l’amour du prochain 


 8. « Tu aurais beau rester à jeun, coucher sur la dure, manger de la cendre, pleurer sans cesse, si tu n’es pas utile à d’autres, tu ne fais rien de grand », dit saint JeanChrysostome.
Cette réflexion de saint Jean Chrysostome lui est venue après la vie monastique qu’il mena pendant six ans. Une période qui avait marqué sa vraie vocation qui s’en trouve être la vie apostolique au service de la communauté des fidèles. Pour lui, et les gens du monde et les moines ont bien le devoir d’atteindre la perfection par le service de prière, d’édification et le service apostolique. Ainsi vivre l’idéal évangélique c’est être en communion avec le frère. 

 9. En effet, Jean Chrysostome (344-407) est un Père de l’Église orientale. Éduqué par sa mère, il a suivi des leçons de rhétorique. C’est ainsi qu’on le nommera « bouche d’or ». Il tente d’ouvrir les yeux sur la réalité de l’amour du frère, sur la pratique de la charité. Il est certain avec lui, que la foi sans œuvres est nulle (Jc 2, 14-26) ; que l’on peut bien déplacer les montagnes ou parler toutes les langues du monde mais sans amour l’on n’a rien fait (1Co 13, 1-10). 

 10. La considération ou l’attention de l’autre dans une communauté est le message même de Jésus-Christ. Quand il dit : « Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’aurez fait » (Mt 25, 40). Une communauté ne sera solide que si elle mettait tout en commun (Ac 2, 42-44). Jean Chrysostome dans son Commentaire de l’Évangile de Matthieu réaffirme l’idée de la considération de l’autre, du pauvre dans nos communautés : « Quel avantage peut retirer le Christ si sa table (son autel) est couverte de vases d’or, tandis que lui-même meurt de faim dans la personne des pauvres ? Commencez par le rassasier, lui qui a faim et ensuite, s’il vous reste encore de l’argent, ornez aussi son autel ». C’est même l’éternelle révolution du christianisme : on tombe toujours dans le culte, dans le fait de faire des pratiques de culte et on s’en tient là mais on n’aime pas notre frère. C’est toujours l’éternelle… C’est ce qu’ont toujours dit les prophètes qui se sont élevés contre ceux qui se donnaient bonne conscience parce qu’ils étaient en règle avec le culte qu’ils auraient dû aimer : pourvoir aux besoins de la veuve, des orphelins, etc. 

 11. Dans son éloquence, Jean Chrysostome continue : « Tu lui offres un calice en or et tu ne lui donnes pas un verre d’eau fraîche, quel bénéfice en retire-t-il ? Tu procures pour l’autel des voiles tissés d’or et tu ne lui offres pas le vêtement qui lui est indispensable… Dis-moi : si tu voyais un homme privé de la nourriture qui lui est nécessaire, le laisseras-tu, par hasard, mourir de faim et te dédirais-tu alors à couvrir la table d’argent ? Crois-tu que ce pauvre te remercierait ? Ne s’indignerait-il pas plutôt contre toi ? Et si, le voyant couvert de haillons… tu négligeais de lui donner un vêtement pour élever des colonnes dorées en disant que tu le fais en son honneur ? Ne crois-tu pas qu’il considérerait cela comme une dérision de ta part et comme une insulte suprême ? Pense la même chose du Christ, quand il va errant et pèlerin, ayant besoin d’un toit… Ceci n’est pas une défense d’honorer Christ par de tels dons, mais pour nous exhorter à offrir notre aide aux pauvres en même temps que ces dons, ou mieux encore : à faire précéder l’aide concrète aux dons symboliques. Dieu n’a jamais condamné quelqu’un parce qu’il n’a pas donné de riches ornements à ses temples ; mais il menace de l’enfer… si l’on néglige d’aider les pauvres. Sur le même chemin, vont les pas d’Ambroise de Milan : « Prêtez votre argent au seigneur par les mains du pauvre ». Les dons faits aux pauvres obligent Dieu, car il est écrit : « Celui qui a pitié du pauvre prête au Seigneur… » (Pr 19, 17).

 12. Pour faire bref, la pensée de Jean Chrysostome intéresse notre carême. Certes la Pâques pointe à l’horizon, mais il n’est pas encore tard de penser à ce Jésus abandonné (le pauvre) qui se tient chaque jour devant nos portes, sur les parvis de nos églises, aux croisés de nos chemins… car c’est en se souvenant de lui que nous accueillons Christ dans notre vie : « Qui vous accueille, m’accueille moi-même et qui m’accueille, accueille Celui qui m’a envoyé » (Mt 10, 40). La vie en communauté tient sa nécessité dans la considération de tout un chacun (l’autre) comme soi-même. Sur cette ligne, la règle d’or nous éclaire davantage : « Ainsi, tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : voilà la loi et les Prophètes ».


Fructueux temps de carême ! Fructueuse semaine sainte ! Fructueuse fête de Pâques !



[1] Nous pensons au verbe hébreu Shûb : Retourner vers…

[2] Le chiffre 40 est symbolique. Il ressemble à l’expérience du peuple hébreu qui traversait le désert vers la Terre Promise pendant 40 ans. Les mentions du chiffre 40 dans la Bible : Jos 5, 6 ; Gn 7, 4 ; Ex 24, 18 ; 1R 19, 8 ; Jon 3, 4 ; Mt 4, 2.

[3] Se couvrir des cendres ou s’asseoir sur la cendre en signe de pénitence est une pratique souvent rapportée dans les récits de l’Ancien Testament (Jon 3, 6 ; 2 Sam 13, 19). Le rite est donc celui de pénitence, mais aussi celui de souffrance et de douleur devant ce qu’on a vécu. Les cendres se reçoivent sur la tête ou sur le front, siège de l’intelligence et de la pensée. À ce moment, le fidèle entend la parole qui lui annonce qu’il redeviendra poussière (Gn 3, 19). Comme la poussière de cendres s’envole au vent, il se rappelle que sa vie est fragile et il s’interroge sur sa destinée. L’autre parole s’adresse plus au cœur qu’à la tête et invite à la conversion (Mt 1, 15). Et les cendres sont en principe les cendres des rameaux de l’année précédente qui ont été brûlées. 

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